1 — Nom du courant et période historique
Nom du courant : Mercantilisme
Période historique : Du XVIe siècle (1500s) au début du XVIIIe
siècle (vers 1750–1776)
Définition :
Le mercantilisme est un courant de pensée économique
ancien qui considère que la richesse d’une nation repose sur l’accumulation
de métaux précieux (or, argent), obtenue par une balance commerciale
excédentaire (exporter plus qu’on importe). Il repose sur l'idée que l’économie
doit être contrôlée par l’État, pour renforcer la puissance du pays.
Repères chronologiques :
- XVIe
siècle : apparition des premières idées mercantilistes en Espagne et
au Portugal avec l’afflux d’or issu des colonies d’Amérique.
- XVIIe
siècle : apogée du mercantilisme en France (Colbert) et en Angleterre
(Mun), avec l’organisation d’une économie au service de l’État.
- XVIIIe
siècle (à partir de 1776) : déclin progressif du courant, fortement
critiqué par Adam Smith dans La Richesse des nations, qui
marque la naissance de l’économie libérale classique.
Le mercantilisme naît dans une Europe en transformation
: développement du commerce maritime, constitution des États-nations, guerres
fréquentes entre royaumes, premières formes d’industrialisation, et expansion
coloniale. Il est à la fois une théorie de la richesse et une doctrine
de gouvernement économique.
2 — Contexte intellectuel et historique
Le mercantilisme émerge entre la fin du Moyen Âge et
l’époque moderne, dans une Europe en pleine mutation. Il ne naît pas dans les
universités ou les salons philosophiques, mais dans les cours royales et les
bureaux des ministres, à un moment où l’économie devient un instrument de
puissance politique. Trois grands facteurs expliquent son apparition : la
consolidation des États, la révolution commerciale et le changement des
rapports sociaux.
D’abord, sur le plan politique, les royaumes européens se
transforment progressivement en États centralisés et souverains, dirigés
par des monarques absolus. En France, en Espagne ou en Angleterre, le roi
concentre les pouvoirs et cherche à asseoir sa domination non seulement sur son
territoire, mais aussi sur la scène internationale. Pour cela, il lui faut des
ressources. Le mercantilisme vient fournir un mode d’emploi : enrichir le
royaume, c’est renforcer le pouvoir royal. La richesse devient une affaire
d’État, au même titre que l’armée ou la justice.
Ensuite, l’Europe vit une véritable révolution
commerciale. Les grandes découvertes, notamment l’ouverture des routes
maritimes vers l’Asie, l’Afrique et l’Amérique, bouleversent les circuits
économiques. L’afflux massif de métaux précieux venus des colonies (notamment
d’Amérique du Sud) fait naître une obsession : l’or et l’argent deviennent les
symboles de la puissance. L’économie se mondialise, les ports se développent,
et les États veulent prendre leur part dans ce commerce florissant.
Parallèlement, les sociétés européennes changent. La
noblesse d’épée perd en influence face à une bourgeoisie marchande de
plus en plus riche et influente. Ces marchands, armateurs, banquiers ou
manufacturiers soutiennent l’idée d’une économie organisée, où l’État protège
la production nationale, limite les importations, et ouvre des débouchés à
l’export. Le mercantilisme, en ce sens, incarne une alliance entre pouvoir
politique et intérêts commerciaux.
Enfin, sur le plan intellectuel, il faut rappeler que
l’économie n’est pas encore une science autonome. Les mercantilistes ne
cherchent pas à modéliser ou à dégager des lois générales, mais à proposer des
solutions concrètes aux problèmes du moment. Leurs écrits sont destinés aux
souverains et aux ministres, souvent rédigés sous forme de mémoires, de
recommandations, de traités pratiques. Leur but : guider l’action de l’État.
Le mercantilisme est l’expression d’une époque où l’économie
se met au service de la puissance monarchique. Il s’inscrit dans un
contexte de centralisation politique, d’expansion commerciale mondiale et de
transformation sociale. Son émergence n’est pas abstraite : elle est
directement liée aux besoins concrets des États en quête de richesse, de
sécurité et de grandeur.
3 — Principales idées et mécanismes théoriques
Le mercantilisme repose sur une idée centrale : la
richesse d’un pays se mesure à la quantité de métaux précieux qu’il détient,
principalement l’or et l’argent. Ces métaux sont perçus comme le fondement de
la puissance politique, car ils permettent de financer les guerres, de soutenir
l’administration royale et de renforcer l’autorité du souverain. Dès lors,
l’objectif économique devient clair : faire entrer le plus d’or possible
dans le royaume et éviter qu’il n’en sorte.
Cela implique que les exportations doivent être supérieures
aux importations. Le commerce extérieur devient ainsi une arme économique. Un
pays qui vend beaucoup à l’étranger reçoit des paiements en espèces ; s’il
achète trop, il s’appauvrit. Cette vision repose sur une logique de somme
nulle : dans un échange commercial, ce que l’un gagne, l’autre le perd. Il
ne s’agit pas encore, comme chez les économistes classiques, de penser des
gains mutuels au commerce, mais plutôt de chercher à dominer les échanges.
Dans ce cadre, l’État joue un rôle moteur. Il ne se
contente pas de garantir l’ordre public ou la monnaie : il organise,
contrôle, oriente l’économie dans un objectif de puissance. Il favorise les
secteurs stratégiques, impose des normes de qualité, crée des manufactures
d’État, établit des monopoles commerciaux, taxe les importations, subventionne
les exportateurs… Le protectionnisme n’est pas un outil accessoire : c’est une
doctrine centrale. Il s’agit de produire le maximum chez soi et d’acheter le
minimum à l’étranger.
Le mercantilisme valorise donc la production
manufacturière (en particulier les biens transformés à haute valeur
ajoutée), bien plus que l’agriculture. Il soutient l’industrie locale,
encourage l’innovation technique dans les manufactures et impose des règles
strictes pour garantir la compétitivité. Le commerce maritime est également au
cœur du système : navires, ports, compagnies commerciales bénéficient de
soutiens spécifiques, car ce sont eux qui permettent de faire circuler la
richesse et de la capter.
Cette logique s’applique aussi aux colonies. Ces territoires
lointains ne sont pas conçus comme des partenaires égaux, mais comme des réservoirs
de ressources (épices, sucre, coton, métaux), dont les richesses doivent revenir
à la métropole. L’économie coloniale est construite comme un système
fermé au service du centre.
Prenons un exemple concret : la politique de Jean-Baptiste
Colbert en France au XVIIe siècle. Il crée de grandes manufactures de textile,
interdit certaines importations, impose des normes précises sur la qualité des
produits, accorde des privilèges à des compagnies maritimes, et impose des
taxes douanières dissuasives aux produits étrangers. Tout est pensé pour que la
France vende plus qu’elle n’achète, conserve ses métaux précieux, et s’affirme
comme une puissance économique.
Le mercantilisme est une pensée économique pragmatique, où l’État, le
commerce extérieur, et l’accumulation de richesses métalliques constituent
les piliers de la prospérité nationale. Il s’agit moins d’une science
économique que d’un système politique appliqué à l’économie, au service
d’un objectif : renforcer l’État dans un monde de rivalités.
4 — Auteurs majeurs et œuvres fondatrices
Le mercantilisme n’a pas de « père fondateur » unique ni de
traité fondateur comparable à La Richesse des nations d’Adam Smith. Il
s’agit plutôt d’un ensemble de doctrines pratiques développées par des
ministres, des conseillers royaux, des commerçants et des juristes au
service de leur État. Ces auteurs n’ont pas toujours théorisé l’économie, mais
leurs actions et leurs écrits ont contribué à structurer le courant
mercantiliste dans plusieurs pays.
🇫🇷 Jean-Baptiste
Colbert (1619–1683) – France
Fonction : Contrôleur général des finances de Louis
XIV de 1665 à 1683
Contribution : Figure emblématique du mercantilisme d’État,
parfois appelé colbertisme.
¾
Il ne laisse pas une œuvre théorique structurée,
mais ses ordonnances, correspondances et réformes économiques
forment un véritable système.
¾
Il développe les manufactures royales,
encadre la production (textile, verre, armes…), impose des normes de qualité,
et organise un protectionnisme actif.
¾
Il soutient les compagnies coloniales et
maritimes, modernise les ports, et réforme la fiscalité pour accroître les
revenus de l’État.
Colbert incarne une version dirigiste, centralisée et
industrielle du mercantilisme, fondée sur l’idée que l’État doit organiser
l’économie pour accroître sa puissance.
🇬🇧 Thomas Mun
(1571–1641) – Angleterre
Œuvre principale : England’s Treasure by Forraign
Trade (publiée en 1664, après sa mort)
Contribution : Théoricien du commerce extérieur comme source principale
de richesse nationale.
¾
Il défend le principe d’une balance
commerciale excédentaire comme objectif de toute politique économique.
¾
Il critique les dépenses excessives et encourage
l’épargne nationale et la modération des importations de luxe.
¾
Il plaide pour un commerce actif, soutenu
par l’État mais laissant de la place à l’initiative marchande.
Thomas Mun représente une forme plus commerciale et libérale
du mercantilisme anglais, centrée sur les échanges extérieurs et la domination
maritime.
Autres figures secondaires (selon les pays) :
¾
Antonio Serra (Italie) – Breve
trattato delle cause che possono far abbondare li regni d’oro e d’argento
(1613) : premier traité à formuler que la richesse d’un pays dépend de sa
structure productive plus que de ses ressources naturelles.
¾
Philipp Wilhelm von Hornick (Autriche) – Austria
Over All If She Only Will (1684) : manifeste pour une économie nationale
autosuffisante et dirigée par l’État.
¾
Gerard de Malynes, Josiah Child
(Angleterre) : défenseurs d’un contrôle étatique sur la monnaie et le commerce.
À retenir :
¾
Le mercantilisme n’est pas un courant unifié,
mais un ensemble de politiques nationales convergentes, où les penseurs
sont souvent des hommes d’État ou de commerce.
¾
Colbert et Mun symbolisent deux versions
du mercantilisme : l’une étatique et industrielle, l’autre commerciale
et maritime.
5 — Applications concrètes et politiques économiques
inspirées du mercantilisme
Le mercantilisme n’est pas resté une théorie : il a été largement
appliqué par les États européens entre le XVIe et le XVIIIe siècle. Ces
politiques concrètes, bien que variées selon les pays, ont toutes reposé sur la
même idée : organiser l’économie nationale pour enrichir l’État et renforcer
sa puissance, en contrôlant les échanges, en développant la production
intérieure, et en dominant les flux commerciaux.
En France, c’est sous le règne de Louis XIV que le
mercantilisme atteint son sommet, avec Jean-Baptiste Colbert comme principal
artisan. Ministre des finances, Colbert conçoit une économie entièrement
pilotée par l’État. Il fait créer de grandes manufactures royales dans des
secteurs jugés stratégiques comme le textile, la verrerie ou l’armement. L’idée
est de produire en France des biens de qualité, destinés à être exportés, tout
en réduisant au maximum les importations. Pour cela, il impose des règles très
strictes sur la qualité des produits et fait adopter un régime douanier
protecteur. L’économie est pensée comme une machine contrôlée du sommet,
où chaque secteur a un rôle précis dans l’enrichissement du royaume. La flotte
marchande est également développée, tout comme les compagnies coloniales. À
travers ces instruments, Colbert cherche à faire de la France une puissance
commerciale et industrielle capable de rivaliser avec les Pays-Bas et
l’Angleterre.
En Angleterre, la logique mercantiliste prend une forme un
peu différente, davantage orientée vers le commerce maritime. À partir du
milieu du XVIIe siècle, les autorités mettent en place les célèbres Navigation
Acts, qui interdisent aux navires étrangers d’importer ou d’exporter dans
l’empire britannique. L’objectif est de réserver les profits du commerce
international aux navires et marchands anglais. En parallèle, l’État
soutient activement les grandes compagnies commerciales comme la East India
Company, qui deviennent des instruments d’expansion coloniale. Cette stratégie
vise à asseoir la domination de l’Angleterre sur les mers, en captant les flux
de richesse venant d’Asie, d’Afrique et des Amériques.
L’Espagne, quant à elle, représente un autre cas de figure.
Elle bénéficie très tôt de l’afflux massif d’or et d’argent grâce à la conquête
des empires aztèque et inca. Cependant, contrairement à la France ou à
l’Angleterre, elle ne développe pas une industrie nationale robuste. Elle
importe de nombreux produits manufacturés d’autres pays européens, notamment
des Pays-Bas. Cette dépendance a pour conséquence une forte inflation et un
affaiblissement progressif de sa puissance. On parle parfois de mercantilisme
passif, car l’Espagne s’est enrichie sans bâtir une économie productive
autonome.
Dans chacun de ces exemples, le mercantilisme se manifeste
par un pilotage étatique de l’économie au service de la puissance
nationale. La production, le commerce et la fiscalité sont mobilisés pour
atteindre un but : accroître la richesse du royaume et asseoir son
indépendance dans un contexte de rivalités européennes. Ces politiques ont jeté
les bases de ce qu’on appelle aujourd’hui une économie administrée ou
planifiée, bien avant le socialisme ou le keynésianisme.
6 — Critiques et limites du mercantilisme
Dès le XVIIIe siècle, le mercantilisme commence à être
vivement critiqué, notamment par les penseurs du courant libéral naissant. Ces
critiques portent autant sur les principes théoriques du mercantilisme
que sur ses effets pratiques, parfois jugés contre-productifs. À cela
s’ajoutent des limites historiques observables, qui fragilisent son
efficacité à long terme.
La première critique majeure concerne sa conception de la
richesse. Pour les mercantilistes, accumuler de l’or et de l’argent est un
objectif en soi. Or, des économistes comme Adam Smith vont contester cette idée
: ce qui compte vraiment, selon eux, ce n’est pas le stock de métaux précieux,
mais la capacité d’un pays à produire des biens et des services utiles à
ses habitants. Une nation peut très bien être riche en or, mais pauvre en
production et en consommation réelle.
Deuxième critique : le mercantilisme repose sur une vision conflictuelle
du commerce, dans laquelle chaque pays cherche à tirer le maximum des
échanges au détriment des autres. Le commerce est perçu comme un jeu à somme
nulle. Cette logique est battue en brèche par la théorie des avantages
comparatifs, développée plus tard par Ricardo, qui montre qu’il est possible
pour deux pays de gagner en se spécialisant et en échangeant selon leurs
compétences respectives. Autrement dit, le commerce peut être un jeu
gagnant-gagnant.
Un autre reproche porte sur le rôle exagérément central
accordé à l’État. Dans le modèle mercantiliste, l’économie est encadrée dans
ses moindres détails : autorisations, normes, privilèges, monopoles, taxes,
règlements sur les prix et les salaires. Cette surcharge administrative peut
entraîner de la lourdeur bureaucratique, de la corruption, des inégalités
d’accès au marché et freiner l’initiative privée. Dans certains cas,
les acteurs économiques préfèrent contourner les règles, voire développer un
commerce clandestin.
L’histoire fournit également des exemples des limites
concrètes du modèle. L’Espagne, bien qu’ayant accumulé d’immenses quantités
d’or grâce à ses colonies, n’a pas développé une industrie solide et a fini par
s’enliser dans une dépendance commerciale et une perte d’influence. Le cas
espagnol montre que l’accumulation de richesses métalliques ne suffit pas à
garantir la prospérité durable d’une nation.
Enfin, les implications morales et sociales du
mercantilisme peuvent aussi être remises en question. Le modèle colonial qu’il
soutient repose souvent sur l’exploitation brutale des territoires conquis,
parfois au moyen de l’esclavage. La richesse de la métropole repose alors sur
la misère d’autres peuples, sans véritable logique de réciprocité ou de
développement partagé.
Face à ces critiques, les partisans du mercantilisme ont pu
répondre en insistant sur le contexte : dans un monde instable, où les guerres
sont fréquentes, l’autonomie économique et la puissance de l’État sont des
priorités stratégiques. Ils défendent aussi le rôle protecteur de l’État
envers des industries encore fragiles, argument qui trouvera un écho plus tard
chez les protectionnistes du XIXe siècle.
Pour conclure :
Le mercantilisme a été critiqué pour sa vision étroite de la richesse,
son protectionnisme rigide, et son encadrement excessif de l’économie.
Bien qu’efficace dans certains contextes, il s’est révélé fragile à long terme,
notamment face à l’émergence du libéralisme et des premières formes d’économie
de marché.
7 — Héritage et postérité du mercantilisme
Même si le mercantilisme a été critiqué et supplanté sur le
plan théorique par le libéralisme économique à partir de la fin du XVIIIe
siècle, ses idées n’ont jamais totalement disparu. Certaines pratiques
inspirées du mercantilisme réapparaissent régulièrement, adaptées aux enjeux
contemporains. On parle alors parfois de néo-mercantilisme.
L’un des héritages les plus durables du mercantilisme réside
dans l’idée que l’économie est un instrument de puissance nationale.
Cette conception reste très présente dans les politiques économiques modernes,
en particulier dans les contextes de tension internationale, de guerre
commerciale ou de relocalisation industrielle. Des États continuent de
concevoir leur stratégie économique en fonction de leur balance commerciale,
de leur autonomie stratégique, ou de la maîtrise de secteurs clés.
Le lien entre souveraineté économique et sécurité nationale, si central chez
les mercantilistes, reste un thème d’actualité.
Certaines grandes puissances économiques actuelles adoptent
des stratégies très proches dans leur logique. La Chine, par exemple,
soutient activement ses exportations, limite certaines importations, accumule
d’importantes réserves de devises étrangères, et développe une politique
industrielle centralisée et pilotée par l’État. Le modèle allemand,
fondé sur un fort excédent commercial, une industrie de pointe et une certaine
modération salariale, est parfois lui aussi qualifié de néo-mercantiliste.
On retrouve aussi des relents de mercantilisme dans les
politiques de protection des industries nationales. Par exemple, les
États-Unis ont à plusieurs reprises mis en œuvre des politiques douanières
ciblées pour protéger des secteurs stratégiques (acier, semi-conducteurs,
énergie…). Les slogans comme “Buy American” ou “Made in France” traduisent
cette volonté de favoriser la production nationale, parfois au détriment
de la logique libre-échangiste.
La crise du COVID-19 a également remis en lumière certains
principes mercantilistes. Face à la dépendance en matière de médicaments, de
masques ou de composants électroniques, de nombreux pays ont redécouvert la
nécessité de sécuriser leurs approvisionnements et de produire
localement ce qui est vital. Le discours sur la « souveraineté économique »
a alors gagné en force.
Enfin, au niveau intellectuel, le mercantilisme a marqué
l’histoire de la pensée économique en posant des questions fondamentales : qui
contrôle l’économie ? Pour quel objectif ? Au nom de quelle puissance ?
Même s’il a été dépassé sur le plan théorique, il a servi de tremplin aux
économistes classiques, qui se sont construits contre lui.
Le mercantilisme ne survit pas comme doctrine pure, mais ses principes
fondamentaux réapparaissent sous des formes nouvelles dans le monde
contemporain : volonté de maîtrise, protectionnisme stratégique, priorité à
l’intérêt national. Il continue d’alimenter les débats sur la frontière
entre marché et État, entre économie ouverte et économie
souveraine.
8 — À retenir
Élément |
Contenu essentiel |
Période |
XVIe – XVIIIe siècle |
Définition |
Courant économique visant à enrichir l’État par
l’accumulation d’or et d’argent |
Objectif central |
Obtenir une balance commerciale excédentaire |
Vision du commerce |
Jeu à somme nulle : ce que l’un gagne, l’autre le perd |
Rôle de l’État |
Très actif : contrôle de la production, commerce,
fiscalité, normes, monopoles |
Production valorisée |
Industries nationales (manufactures), moins d’intérêt pour
l’agriculture |
Outil principal |
Protectionnisme : taxes à l’importation, soutien à
l’exportation |
Colonies |
Sources de matières premières et débouchés fermés pour les
produits métropolitains |
Figures clés |
Jean-Baptiste Colbert (France), Thomas Mun (Angleterre) |
Critiques majeures |
Vision étroite de la richesse, inefficacité à long terme,
rigidité bureaucratique |
Postérité |
Néo-mercantilisme contemporain : Chine, États-Unis,
relocalisations industrielles |
Lexique
¾
Balance commerciale : différence entre
les exportations et les importations.
¾
Protectionnisme : politique visant à
limiter les importations pour protéger les producteurs nationaux.
¾
Manufacture royale : entreprise créée ou
soutenue par l’État pour produire des biens stratégiques.
¾
Compagnie coloniale : entreprise ayant un
monopole commercial sur un territoire colonial (ex. : East India Company).
¾
Néo-mercantilisme : politique
contemporaine reprenant certains principes mercantilistes dans un cadre
moderne.
9 — Exemple schématique
Ce schéma met en évidence la logique circulaire et
stratégique du mercantilisme : production → exportation → richesse →
puissance → investissement → production, avec l’État comme chef d’orchestre
et les colonies comme variables dépendantes du système.
10 — Pour aller plus loin
Pour enrichir la compréhension du mercantilisme,
voici une sélection de lectures, ressources complémentaires, et pistes
pédagogiques adaptées aux lycéens (SES, HGGSP, IB Economics) et aux
enseignants souhaitant approfondir ou relier cette doctrine aux débats
contemporains.
Lectures historiques et textes fondateurs
- Thomas
Mun, England’s Treasure by Forraign Trade (1664)
→ Défense classique de la balance commerciale excédentaire comme source de richesse nationale. - Jean-Baptiste
Colbert, Lettres, instructions et mémoires (extraits
rassemblés)
→ Écrits politiques et administratifs révélant la pratique du mercantilisme d’État en France. - Philipp
Wilhelm von Hornick, Austria Over All If She Only Will (1684)
→ Programme économique typiquement mercantiliste, très structuré, centré sur l’autosuffisance.